« Elegischer Gesang »

Chacque vendredi, Beethoven est ici. Pour le 250e anniversaire de la naissance de Beethoven, la Revue Musicale Suisse jettera chaque semaine un œil sur une œuvre différente de son catalogue. Aujourd’hui pour l’« Elegischer Gesang » pour chœur et orchestre à cordes.

Extrait du portrait de Beethoven par Joseph Karl Stieler, ca. 1820

C’est fou ce qu’on peut se tromper. Franz Schubert n’a jamais pris de leçons de contrepoint juste avant sa mort, pas plus qu’Alban Berg n’a cité le choral Es ist genug de Bach dans sa dernière œuvre, le Concerto pour violon. C’est la logique inversée de la postérité qui cherche à donner un sens à l’enchaînement des événements, à construire une cohérence biographique et à intégrer l’idée que le monde suive un plan – d’ailleurs, plus modestement, il est rare que dans notre propre vie, les choses soient dirigées par la logique. Même l’Elegischer Gesang op. 118 de Beethoven, publié à titre posthume en août 1827, n’a pas été épargné par ces aberrations. La même année, Adolf Bernhard Marx note dans une brève critique que : « Les derniers poèmes musicaux de Beethoven évoquent parfois une émotion si tendre, si intime, si transfigurante que l’on est tenté d’y comprendre qu’il sentait sa fin venir ; ce sont des rêves et des prémonitions qui flottent sur les cordes, comme s’ils allaient bientôt quitter la terre, dans un souffle […] qui réveille le son et s’éteint avec lui » (Berliner Allgemeine Musikalische Zeitung).

Nous savons aujourd’hui que ce chant élégiaque, largement méconnu et même très rarement interprété, a été composé 13 ans plus tôt, probablement à l’occasion du troisième anniversaire de la mort d’Eleonore von Pasqualati, le 5 août 1814. Il s’agit de la deuxième épouse du baron Jean-Baptiste von Pasqualati, ami de longue date de Beethoven, avocat et propriétaire terrien, qui est décédée à l’âge de 24 ans, vraisemblablement en couches. L’œuvre n’a probablement jamais été destinée à un grand chœur ou orchestre (comme elle est généralement enregistrée), mais plutôt à une exécution dans le cadre d’un office religieux privé de commémoration. En tout état de cause, l’instrumentation indique que les quatre voix sont accompagnées par un seul quatuor à cordes (expressément sans contrebasse) : « avec accompagnement par deux violons, alto et violoncelle ». Interprétée de cette manière, la partition apparaissait déjà aux contemporains comme un « chef-d’œuvre qui, sans grands moyens et si l’on répète bien, peut être joué avec un succès incontestable lors de la plus digne célébration des funérailles de personnes chères » (Leipziger Allgemeine musikalische Zeitung, 1827).


Aufnahme auf idagio


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