Sonate pour violon « Kreutzer »

Chacque vendredi, Beethoven est ici. Pour le 250e anniversaire de la naissance de Beethoven, la Revue Musicale Suisse jettera chaque semaine un œil sur une œuvre différente de son catalogue. Aujourd’hui pour la sonate pour violon et piano n° 9 en la majeur « Kreutzer ».

Extrait du portrait de Beethoven par Joseph Karl Stieler, ca. 1820

Les possibilités musicales que la sonate pour violon et piano laissait encore au début du 19e siècle et le peu de contraintes imposées au traitement des instruments sont visibles sur la page de titre de la Sonate de Beethoven op. 47, nommée « Sonate Kreutzer » en raison de sa dédicace : il s’agit d’une Sonata per il Piano-forte ed un Violino obligato, scritta in un stile molto concertante, quasi come d’un concerto – une sonate pour piano et violon obligé, écrite dans un style très concertant, quasi comme un concerto. Avec une telle liberté dans l’intitulé, ce n’est pas un hasard si, tout au long du 19e siècle (et pas seulement en ce qui concerne le violon), aucune esthétique particulière ne s’est développée pour la sonate pour piano et instrument mélodique.

Beethoven a dédié cette œuvre au violoniste virtuose français Rodolphe Kreutzer, bien que, selon Hector Berlioz, celui-ci ne l’a jamais jouée et l’a même décrite comme « outrageusement inintelligible ». Mais Beethoven ne trouve pas beaucoup plus de compréhension parmi ses contemporains germanophones. Il a même été accusé de ne rien vouloir d’autre que se différencier de ses confrères : un compte-rendu de l’Allgemeine musikalische Zeitung de Leipzig parlait de « terrorisme esthétique ou artistique » – ce qui peut être compréhensible avec un premier mouvement de pas moins de 599 mesures. Les exigences techniques de cette sonate y sont considérées comme très élevées, et l’œuvre n’est recommandée que pour des occasions bien particulières : « si deux virtuoses pour qui plus rien n’est difficile, qui possèdent tellement d’esprit et de connaissances que, si on y ajoute la pratique, ils pourraient écrire eux-mêmes des œuvres de ce genre, et qui, précisément à cause de cet esprit flottant au-dessus de l’ensemble, ne sont pas dérangés par les excès les plus particuliers des différentes parties : s’ils se réunissent, étudient l’œuvre (car eux aussi devront le faire), s’ils attendent maintenant l’heure où même le grotesque peut et doit être apprécié, à condition qu’il soit fait avec esprit, et s’ils jouent maintenant à cette heure : alors ils en tireront un plaisir complet et riche. »

L’idée d’un tel moment musical fait immédiatement penser au roman La Sonate à Kreutzer de Léon Tolstoï (1889), dans lequel la composition de Beethoven agit comme un catalyseur d’émotions, transformant l’amour du protagoniste en jalousie avide de pouvoir. Un drame psychologique sur les émotions refoulées dans la bourgeoisie de l’époque. Au chapitre 21, Tolstoï écrit : « Lorsque deux personnes se consacrent à l’art le plus noble, la musique, il doit y avoir une certaine compréhension intime ; une telle approche n’a rien de répréhensible, et seul un homme stupide et jaloux peut y voir quelque chose de contestable. Néanmoins, tout le monde sait bien que c’est par le biais de ces activités, notamment la musique, qu’une grande partie des adultères se produisent dans notre société. »
 


Aufnahme auf idagio


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